REPORTÉ | SOLIDARITÉ NOAILLES - Foire d'Art et d'Artisanat, 1er au 4 décembre 2024
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Jusques à quand, jusques à quand ? ...

Le message dont je viens de prendre connaissance se lit comme suit:
Jacques Roche, auteur du "Vent de Liberté", poète et journaliste né le 21 juillet 1961, kidnappé le 10 juillet 2005, torturé et assassiné le 14 juillet 2005.



Jean Morisset
Jean Morisset
Dans cette exaspération de la vie et des êtres que connaît Haïti comme des clapots s'entrechoquant sur la mer, on a assassiné une poésie, on a trucidé une pensée en pleine effervescence créatrice, et notre âme crie sa douleur et sa peine sans ne plus savoir où les diriger.

Pour nous, étrangers familiers qui passons et repassons par Quisquéya, séduits et confrontés par le pôle de la trajectoire franco-créole en cette terre d'Amérique, nous demeurons consternés.

Jusques à quand, jusques à quand ?

Pourquoi, pourquoi chaque fois que s'élève une voix ayant le courage et la beauté de ne pas sacrifier ses viscères aux seules tentations de l'analyse et de la raison le vent de liberté qui l'habite, pourquoi faut-il qu'elle soit assassinée ?

Je me souviens de l'homme, je me souviens de la soirée de poésie des «vendredi soir littéraire» qu'il animait il y a peu, dans un Port-au-Prince déchiré, avec Lionel Trouillot et tous les autres. Et voilà qu'en dépit de la cacophonie des bruits et des rumeurs, il y avait pour un moment, à peine la brunante estompée, des voix du cour et du rêve, du combat houleux et de la mémoire saignante qui se côtoyaient et se fusionnaient dans un éclatement de vie, de lutte et d'espoir. Au-delà de tout, celle de Jacques Roche se distinguait par sa texture si riche, sa fermeté et la musique d'une voix qui dira un jour ce que voilà :

Un homme [...] craignant
la solitude du silence,
l'opacité de la nuit,
l'étanchéité du néant,
décida de ne pas crever.

Pour atteindre ce but,
il voulut laisser derrière lui un legs
[qui devrait] garder après sa mort,
l'empreinte de ses mains,
l'allure de ses pas
et l'élégance de son regard.

L'ouvre se réaliserait
en complicité avec le soleil, la lune,
les prunelles des enfants,
et le sourire des femmes.

L'homme rassembla dans sa tête
quelques mots simples
qui retenaient l'odeur du temps
[...] et la chose unique et utile
venait de naître: un poème.

Un poème généreux comme les bras ouverts,
le tumulte bleu de l'océan,
[un poème] comme l'essence de la vie
qui le laisserait vieillir
sans vieillir elle-même,
mourir sans mourir elle-même...

Au moment de crever,
une seule vérité compte encore
pour nous et les autres,
pour nous et la vie...
une seule préoccupation
allume encore notre regard:
l'ouvre [...] est-elle née?
et de quel amour, de quel secret,
de quelle folie ?

Le poète comprit alors toute sa vie:
tous ses mots, tous ses silences
ne parlaient que d'amour...

Merci Jacques Roche.

Que te soit offert ici témoignage de solidarité, d'affection et d'admiration. Para siempre. Tu auras été torturé et assassiné pour ton talent, ta vaillance, ta poésie et ta beauté par tous ceux qui reçoivent comme une agression les tenants de la résistance et les combattants de
la liberté.


Jean Morisset,
géographe-écrivain
ce 17 juillet 2005


J’ai retenu mes pleurs, hier, toute la journée, mais en lisant ton mot j’ai éclaté dans la pénombre de Montréal.

Et ce matin à quatre heures, voilà que je suis debout et ma peine ne fait que gonfler. Ils l’ont assassiné, pendant qu’innocents, nous fêtions ou coupions tout bonnement le gazon, nagions dans la mer ou le fleuve.

Mais à Saint-Michel, à la fin de la soirée du 14, vers 23h00, alors que j’étais absent, une branche-arbre immense qui sortait d’un vieux tronc d’arbre et de la masse végétale pour aller chercher la lumière quelque cinquante pieds plus loin, à trente pieds au-dessus du sol, et qui avait fait pousser elle-même sur son ventre aérien des sous-branches qui devenaient autant de petits arbres feuillus et frisés montant joyeusement vers le ciel... est tombée avec fracas. Les voisins se sont levés, paraît-il, pour aller voir ce qui se passait et d’où venait ce tonnerre, ce grand cri poussé dans la nuit. C’était Jacques qu’on venait d’assassiner.

Jean Morisset
Montréal, le 18 juillet 2005

A tous les amis de Jacques Roche

Jack Beng-Thi
Jack Beng-Thi
Je suis complètement anéanti, les mots ne me suffisent plus pour contenir ma colère, après Jean Dominique, une fois de plus les hommes de paroles et de luttes sont assassinés.

C'est vraiment le chaos. Que fait l'ONU ? Quelles sont les personnes qui guident la main des assassins?

Que font les membres du gouvernement provisoire ?

La société civile devra regrouper ses forces et descendre dans les rues pour exiger la recherche des assassins et le rétablissement de l'ordre. Je m'associe ainsi que le peuple réunionnais à votre douleur et à celle du peuple haïtien.

Nous dénoncerons ici dans l'océan indien l'atteinte à la liberté d'expression dans les Caraïbes et dans notre région qui malheureusement n'est pas épargnée.

Je vous demande de poursuivre votre périple en France et de me tenir au fait des évènements qui suivront.

Je passe l'information à tous mes amis à la Réunion.

Bon courage.

Votre ami,
Jack Beng-Thi
La Réunion, 17 juillet 2005

Myriam Mihindou
Myriam Mihindou
...

Je suis profondément touchée et choquée par l'assassinat de Jacques Roche.
...

La population marocaine avec laquelle je m'entretiens, transmet à sa famille toutes ses condoléances.
...

Que la vie protège les justes et dénonce les fous de l'im-pouvoir.

Mes pensées chaleureuses a toute ta famille, à Haïti.

Mon âme accompagne Jacques Roche. Je prie pour lui, je prie son courage pour la liberté de tous.

Myriam Mihindou
Rabat, 25 juillet 2005

Samedi 17 Septembre 2005
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